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Reflex : le n°1 est paru !

La bonne focale des jeunes chercheurs et chercheuses du LIER-FYT.

Reflex - Demandes d'État

Entièrement conçu et édité par les jeunes chercheurs et chercheuses du LIER-FYT, le premier numéro de la revue « Reflex » vient de paraître. A qui s'adresse cette publication, pour l'instant exclusivement disponible sous forme papier ? Quels en sont les objectifs et les intentions ? Réponses avec Marguerite Déon, Alice Le Gall Cecillon, Baptiste Legros et Maëlle Partouche qui ont coordonné ce premier numéro consacré aux « demandes d'État ».

  • Pourquoi avoir voulu faire cette revue ? Et qu'en attendez-vous ?

Avec les doctorant.e.s ayant participé au séminaire d’Oléron nous souhaitions prolonger nos discussions tout en essayant de les étendre à l’ensemble des doctorant.e.s, docteur.e.s et post-docteur.e.s du laboratoire. Le travail de thèse est souvent vécu comme un travail solitaire, et nous avons tendance à occulter l’importance de faire collectif de façon active pour mieux réaliser ce travail.  Nous sommes actuellement 65 doctorant.e.s et 16 docteur.e.s et post-docteur.e.s. Cela veut dire qu’en interne, nous possédons déjà une richesse d’objets et d’approches disciplinaires qui ne demande qu’à être rendue visible pour établir de possibles échanges ou projets communs. Faire collectif en passant par l’écrit et non plus uniquement par la discussion en atelier permet de répondre à un autre besoin que nous avions en partage : formaliser l’informel. Puisque tout travail formalisé (communication, article, organisation de journée d’étude) nécessite une longue série d’épreuves préalables, s’exercer entre pairs en formalisant ce travail informel permet à plusieurs d’entre nous de s’y confronter pour la première fois à travers un projet commun. Il s’agit pour nous de rendre visible et de soumettre à la discussion des étapes de travail le plus souvent invisibilisées. « Réflex », c’est donc une perspective d’intégration, de coopération et de préparation. Ce travail intermédiaire, bien qu'adressé en première instance aux "doct." du laboratoire, est évidemment une porte ouverte à la discussion avec les titulaires. En construisant et solidifiant un travail collectif on espère pouvoir renforcer les échanges avec d'autres collectifs de travail.

  • Pourquoi l'avoir nommée « Reflex » ?

Nous avons réfléchi à de nombreuses propositions de nom pour cette revue informelle : des titres en latin, des noms tout droit sortis des années 30, en passant par des adresses postales et des jeux de mots qu’il vaut mieux oublier ! Reflex a l’avantage de faire écho à plusieurs choses qui nous tiennent à cœur. C’est d’abord un clin d'œil au laboratoire, la réflexivité, telle qu’elle se présente dans le monde social sur lequel nous travaillons. L’idée est également d’avoir le réflexe d’être réflexif dans ces tâches informelles, collectives et souvent invisibles de l’écriture. C’est ensuite, par le biais du vocabulaire de la photographie, une allusion au travail d'enquête : prendre une photo du réel, zoomer sur une partie de monde sociale à partir de nos disciplines et comme l’énonce le sous-titre, proposer une focale collective propre aux jeunes chercheurs et chercheuses. Enfin, ce nom avait l’avantage de ne pas être un terme ancré dans une de nos disciplines et de laisser la place à chacune d’entre elles.

  • Le dossier central de ce premier numéro est consacré à ce que vous appelez les « demandes d'État ». De quoi s'agit-il ?

Le dossier de chaque numéro invite des doctorant·e· à mettre une même paire de lunettes pour traiter des terrains diversifiés. Cet enjeu visant la comparaison est avant tout un exercice pour s’intéresser à des objets qui peuvent sembler éloignés des nôtres. Cela invite donc à esquisser des transversales plutôt que de traiter un domaine d’expertise particulier. Le second enjeu est de venir interroger collectivement cette paire de lunettes et questionner nos évidences théoriques et méthodologiques qui, une fois réinsérées dans la discussion, n’ont plus ce caractère évident. Le dossier c’est l’espace du geste collectif qui s’essaye.

Le thème du dossier de ce premier numéro est le prolongement d’une table ronde consacrée aux doctorant.e.s au Séminaire d’Oléron 2021, visant à interroger la place de l’État dans la Nation. Par ailleurs, cela nous permettait par la même occasion de faire nôtre cet objet tel qu’il est exposé dans le programme scientifique du laboratoire. L’exercice auquel nous nous sommes attelés dans ce premier numéro consiste à saisir comment l’État se manifeste à partir des professions que nous observons sur nos terrains respectifs et quelles opérations sont engagées dans cette extension à hauteur d’État. Cela vient rompre avec des approches faisant de l’État une entité homogène agissant verticalement sur les pratiques des acteurs, en lui opposant une posture nécessairement relationnelle. La demande d’État est donc ce qui précède l’acte d’État, rendu possible par l’existence de l’État, et s’exprimant à partir des groupes professionnels dépendants les uns des autres. S’intéresser à ces demandes, c’est alors tenter de saisir ce que devrait être l’État pour les acteurs, ce qui implique de tracer par contraste ses limites au nom d’une certaine autonomie professionnelle. Il faudrait bien évidemment creuser du côté des raisons de l’activation de cette demande, nous observons néanmoins qu’elle engendre aussi un travail de temporalisation de la part des acteurs. Elle peut prendre la forme d’une historicisation, d’une temporisation, ou encore d’une anticipation, toujours en lien avec une projection. 

  • Le LIER-FYT est un laboratoire interdisciplinaire. En quoi cela constitue-t-il une chance ou une difficulté pour « Reflex » ?

L’interdisciplinarité du laboratoire est d’abord une chance pour la revue Reflex. Elle l’est dans la façon dont les membres de différents pôles ont contribué à la construction de ses rubriques et de leur contenu, suscitant des discussions et un retour sur les disciplines propres à partir de la lecture de travaux, de projets d’articles, de point sur les thèses et d’expériences doctorales. Plus qu’un échange pratique entre disciplines dans la conception du numéro, l’interdisciplinarité du laboratoire se fait ensuite sentir dans la façon dont les contributeur·rice·s réalisent qu’ils·elles sont affecté·e·s par la présence de leurs collègues au sein du laboratoire et au sein de la revue, les rendant plus attentifs aux implications sociologiques, philosophiques, historiques et juridiques de leurs propositions. C’est aussi cette réalisation que nous souhaitons pérenniser en faisant varier les équipes qui constituent la revue au fil des numéros.

Mais il serait insincère de n’y voir qu’une chance, cela aurait pour effet de lisser les postures, les histoires, les concepts et donc tout ce qui fait la richesse et la spécificité de nos disciplines. Il est probablement plus juste de dire que c’est précisément cette difficulté qui nous offre une chance d’éprouver la connaissance et l’ambition que nous nous faisons de notre discipline dans ce dialogue avec les autres. Dire travail interdisciplinaire implique, volens nolens, un travail de différenciation et d’intégration ; sans cette double tâche, soit on perd « -disciplinaire », soit on perd « inter- ». Ce que cette ligne de crête ouvre, c’est donc la possibilité de se challenger et de s’interroger entre disciplines afin de ne pas figer nos dynamiques disciplinaires.

Recueilli par Chloé Loiseau.

 

Pour se procurer un exemplaire de Reflex, écrire à revue.reflex@gmail.com.

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