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Diagnostic Alzheimer, une approche sociolinguistique

Soutenance de la thèse d'Alexandra Caria (LIER-FYT) intitulée "Négociation et prise de décision partagée en consultation gériatrique. Analyse sociolinguistique des pratiques cliniques de diagnostication et d'évaluation de la maladie d'Alzheimer".

Diagnostic Alzheimer, une approche sociolinguistique

Soutenance de la thèse d'Alexandra Caria (LIER-FYT) intitulée "Négociation et prise de décision partagée en consultation gériatrique. Analyse sociolinguistique des pratiques cliniques de diagnostication et d'évaluation de la maladie d'Alzheimer".

105 boulevard Raspail. Salle 2 - 24 juin 2019 - 14h30-18h.

Membres du jury : Michel de Fornel (DE à l'EHESS, directeur de la thèse) - Christian Licoppe (professeur à ParisTech Telecom, rapporteur) - Lorenza Mondada (professeure ordinaire à l'université de Bâle, rapporteure) - Victor Rosenthal (chargé de recherche INSERM) - Ingrid Voléry (professeur à l'université de Lorraine).

Résumé : Folie peu à peu médicalisée, la catégorie "maladie d’Alzheimer" présente une nosographie qui a évolué au fil du temps mais dont, a contrario, les pratiques cliniques de diagnostication et d’évaluation ont connu une étonnante continuité. Bien que l’étiologie incertaine ne permette pas d’élucider l’origine de cette pathologie, et malgré aujourd’hui encore l’absence de traitement qui guérisse la maladie d’Alzheimer ou de test qui détermine avec certitude si un patient en souffre, les médecins disposent du moins d’un protocole permettant en primo-consultation de poser un diagnostic possible ou probable pour des personnes se considérant, ou présentées par leur proche (accompagnant), en déclin cognitif et mnésique, lors de suivis d’évaluer des patients pour ce type de déclin généralement lié à la maladie d’Alzheimer et dans les deux cas de pronostiquer cette maladie à partir d’un tableau symptomatologique précis. Suivant la "mentalité analytique" particulière propre à l’Analyse de conversation d’inspiration ethnométhodologique qui défend une dissolution de l’opposition micro/macro, l’étude linguistique et sociologique, compréhensive et critique des consultations gériatriques filmées en 2008—2009 en contexte hospitalier français donne à voir quatre moments de la consultation (ouverture, tests, entretiens, clôture) cruciaux et propres à ce type de rencontre. Observer une variabilité des pratiques professionnelles soulève des questions qui dépassent celles qui se posent à l’analyse linguistique interactionnelle et à la sociologie compréhensive des professions. Une interprétation sociologique plus critique donne en effet un autre éclairage sur la pratique des professionnels et rend compte de l’ordre social qui s’instaure en consultation.

Force est de constater alors que, malgré l’intention affichée des médecins de donner toute leur place aux patients en les mettant au centre de la rencontre clinique, en situation la parole de ces derniers n’est pas toujours entendue par les autres acteurs de la consultation, tous en prise avec des rapports sociaux de pouvoir. Ainsi, des asymétries dans la relation médecin, patient et accompagnant révèlent en particulier leurs négociations dans l’organisation des échanges et dans les prises de décision. La domination médicale s’exprime d’abord par l’orientation convergente des participants de la rencontre clinique vers une objectivation médicale du déclin cognitif et mnésique, participant au processus de doctorabilité du cas du patient et à la légitimation de la « maladie d’Alzheimer » comme catégorie médicale opératoire. Cette domination fondée sur la légitimité et l’autorité du médecin repose sur des conditions d’échanges imposées aux participants et nécessairement acceptées par le patient et l’accompagnant ; conditions qui s’opérationnalisent au cours de la consultation par l’accomplissement de procédures interactionnelles mises en œuvre à toutes fins diagnostiques ou évaluatives. Finalement, l’asymétrie d’ordres épistémique et interactionnel est une entrée pour observer une domination médicale aux plans catégoriel, social et sociétal. La nécessité pour les participants de procéder en divers moments à un travail de figuration et la persévérance parfois des médecins à poursuivre leur entreprise de doctorabilité lorsque le patient résiste à rendre son cas doctorable mettent en évidence au-delà que les consultations gériatriques visant la diagnostication et l’évaluation de la maladie d’Alzheimer représentent des lieux traversés d’une violence, symbolique, clinique, thérapeutique.

Mots clés : maladie d’Alzheimer- déclin cognitif et mnésique- analyse de conversation - sociolinguistique compréhensive - sociolinguistique critique - pratiques professionnelles cliniques - objectivation médicale - domination médicale - violence (symbolique, clinique, thérapeutique).Diagnostic Alzheimer, une approche sociolinguistique

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